Cannabis Médical

Accoutumance à l’alcool, aux opiacés et aux somnifères

Cannabis et l’accoutumance à l’alcool, aux opiacés et aux somnifères

Depuis plus d’un siècle, il est fréquemment question de l’utilisation des produits dérivés du cannabis pour le sevrage des personnes dépendantes à l’alcool, aux opiacés ou aux somnifères. Récemment, ces effets positifs sur les symptômes de sevrage aux opiacés ont pu être confirmés sur des animaux. Cependant, il faut considérer que la toxicomanie est une maladie qui, en premier lieu, nécessite une véritable prise en charge socio-psychologique. Le cannabis ne peut qu’apporter un soutien complémentaire.

En 1970, une revue spécialisée a publié un rapport du psychiatre californien, le Dr Tod Mikuriya, sur la cure d’une alcoolique âgée de 49 ans (Mikuriya, 1970). Son médecin avait remarqué qu’elle buvait moins d’alcool lorsqu’elle fumait du cannabis. Il s’est alors décidé à encourager sa patiente à utiliser du cannabis chaque fois qu’elle ressentait le besoin de boire. Ensemble, ils ont essayé de trouver un dosage approprié pour que, d’un côté elle arrête la consommation d’alcool, et que de l’autre côté, elle reprenne peu à peu une vie sociale active. « Au bout de cinq mois de traitement avec du cannabis comme produit de substitution, la capacité de discernement de la patiente s’est améliorée et elle a pu de nouveau sortir et se rendre aux endroits publics où, avant, elle buvait excessivement et où elle était systématiquement prise dans un cercle infernal. Maintenant, à la place de boire, elle fume du cannabis afin de ne pas perdre le contrôle de sa volonté. En même temps, son état physique s’est amélioré et elle se trouve moins irritable et pense avoir plus de facilités pour réfléchir et pour se concentrer », explique son médecin en parlant de ce résultat encourageant.

Un homme de 25 ans souffrant de paralysie spasmodique à la suite d’un accident survenu il y a plusieurs années, lui lésant les nerfs moteurs, m’a raconté comment, avec l’aide de son médecin et du cannabis, il a pu surmonter son accoutumance au tétrazépam (Musaril®), médicament prescrit pour lutter contre la spasticité. Aujourd’hui, il n’utilise que du cannabis et il ajoute que cela lui convient parfaitement.

Voici un autre témoignage, d’un homme âgé de 45 ans : « En janvier 1986, j’ai essayé pour la troisième fois d’arrêter de boire de l’alcool. J’avais des hallucinations et je me suis décidé à essayer de nouveau seul. Au moment où les tremblements ont commencé, j’ai fumé du haschich, ce qui a eu un effet atténuant. Pareil pour la montée d’angoisse, des peurs et les crampes. C’est grâce au haschich que j’ai réussi à me remettre sur pied relativement vite. Après environ une semaine, j’allais suffisamment bien pour quitter mon lit. Depuis, je n’ai plus jamais bu une seule goutte d’alcool ».

Troubles du sommeil et insomnies

Uliliser cannabis avec troubles du sommeil et insomnies

Il existe de nombreuses preuves montrant l’amélioration de l’endormissement et de la qualité du sommeil par les cannabinoïdes. Lors d’une étude conduite dans un centre de soins sur plusieurs semaines, les personnes consommatrices régulières de cannabis ont été moins actives et ont dormi davantage lorsqu’elles consommaient beaucoup de cannabis, par rapport aux jours où elles en consommaient moins (Babor, 1976). Les propriétés somnifères du cannabis sont connues depuis plusieurs siècles et sont utilisées pour traiter les troubles du sommeil. Cependant, il faut souligner que les résultats varient selon les personnes. C’est ainsi que Bernhard Fronmüller, médecin-chef à l’hôpital de Fürth (Allemagne), avait présenté une étude en 1869, conduite auprès de 1000 patients souffrant de divers troubles du sommeil. Les sujets ont reçu des traitements à base de diverses substances narcotiques, dont le cannabis. Les résultats concernant un produit extrait du cannabis ont révélé 53 % d’effets positifs, 21,5 % de bienfaits partiels et 25,5 % sans aucun effet. Au cours du XIXe siècle, des produits à base de cannabis étaient déjà prescrits sans hésitation contre l’insomnie du troisième âge.

Les propriétés sédatives des cannabinoïdes sont souvent qualifiées d’effets secondaires indésirables. Par exemple, dans une étude californienne, conduite auprès de patients souffrant de nausées et de vomissements liés à une chimiothérapie contre le cancer, 52 % des sujets qui ont reçu du cannabis et 64 % de ceux ayant pris du Dronabinol (THC), ont signalé l’apparition d’états de fatigue comme un effet secondaire du traitement (Musty, 2001). Les auteurs d’une synthèse d’études sur le bénéfice antiémétique des cannabinoïdes ont désigné certains des effets secondaires comme étant des « effets secondaires fortement utiles », notamment les effets sédatifs, engourdissant et euphoriques. Très souvent des agitations intérieures et des insomnies sont induites par une maladie grave (Tramer, 2001). Selon ces résultats, on peut conclure que les effets sédatifs se manifestent chez près d’un consommateur de cannabis sur deux.

Cependant, en choisissant un moyen thérapeutique pour lutter contre les troubles du sommeil, il est préférable de n’avoir recours tout de suite ni aux somnifères, ni au cannabis, mais plutôt d’essayer de résoudre le problème différemment, par exemple au moyen d’une meilleure hygiène de vie, de méthodes de relaxation ou d’autres pratiques. Dans le cas contraire, l’habitude d’utiliser ces substances s’installent rapidement, tandis que les problèmes à la base ne sont toujours pas résolus.

Impuissance sexuelle et dysfonction érectile

L’effet du Cannabis, Dronabinol sur impuissance sexuelle et dysfonction érectile

La dysfonction érectile est souvent liée à une cause psycho-logique, comme, par exemple, la peur de l’impuissance. Cependant, au cours des dernières années, l’impuissance sexuelle de l’homme a de plus en plus souvent été associée à des causes physiques comme des troubles de la pression artérielle ou des taux d’hormones.

Là encore, les effets anxiolytiques et calmants du cannabis sur l’état physique et psychologique peuvent apporter un bénéfice thérapeutique. De plus, le Dronabinol produit un effet dilatateur des vaisseaux sanguins et ses propriétés psychoactives augmen-tent la sensibilité, par exemple au toucher. De nombreuses femmes apprécient également les produits dérivés de cannabis pour leur effet amplificateur de la libido.

Au travers des civilisations et des âges, le cannabis a été consommé pour ses vertus aphrodisiaques. Il est donc tout à fait pensable que le mythe, ainsi que la diabolisation, du cannabis ont largement, ou du moins en partie, contribué à son usage dans le domaine de la sexualité (Abel, 1981). Tradition-nellement, le cannabis est retrouvé dans le tantrisme (forme de l’hindouisme) et en médecine ayurvédique. Les préparations à base de cannabis sont réputées pour stimuler le plaisir sexuel. Dans les traditions arabes, le cannabis est synonyme d’aphrodisiaque et la littérature, ainsi que la poésie, en témoignent largement.

Au cours des trente dernières années, de nombreuses enquêtes ont été menées dans les pays occidentaux. Ainsi, en 1974, selon les témoignages de 345 étudiants américains, le cannabis a augmenté davantage le désir sexuel chez les femmes que chez les hommes (58 % contre 39 %) (Koff, 1974). En revanche, les hommes ont été plus nombreux à noter un plaisir sexuel plus intense (60 % contre 43 %). En outre, il a été découvert que l’effet était variable avec le dosage. En effet, une plus grande libido et une augmentation du plaisir ont été rapportées lors de consommations de cannabis modérées plutôt que fortes.

Dans un article paru en 1982 dans une revue scientifique, l’auteur, en parlant des drogues psychoactives, a souligné que le cannabis exerçait de toute évidence un effet stimulant sur la sexualité des personnes. « En définitive, il est paradoxal que ce soient plutôt les jeunes adultes qui consomment du cannabis pour augmenter leurs désirs sexuels. Par contre, les personnes qui se trouvent dans la tranche d’âge nettement au-dessus, et qui auraient souvent plus besoin d’aide pour mieux vivre leur sexualité, en consomment moins. Il n’est donc pas logique, qu’il y ait une telle différence entre besoin et utilisation », a-t-il ajouté en soulignant que paradoxalement, les personnes d’un certain âge qui auraient donc plus besoin de stimuli, consom-maient moins de cannabis que les jeunes (Cohen, 1982).

Cannabis et Autisme

Autisme

L’autisme est un trouble du développement complexe qui se manifeste de façon caractéristique dans les trois premières années de la vie. Il s’agit à la base d’un trouble neurologique qui influence le fonctionnement cérébral. Les autistes ont généralement de sévères difficultés de communication et d’intégration sociale.

Un médecin praticien m’a rapporté l’exemple d’un essai de traitement sur un jeune homme autiste âgé de 17 ans. Suite à des administrations de 5 à 7,5 mg de Dronabinol par jour, le patient se montrait moins agité, à l’intérieur tout comme à l’extérieur, et la qualité des contacts avec son environnement s’était améliorée. Il aimait prendre son médicament, bien que la plupart du temps, les autistes refusent de prendre leur traitement. Au cours des deux premières semaines, le jeune homme dormait beaucoup, et la question s’était posée s’il ne valait pas mieux interrompre le traitement. C’est à ce moment que l’effet calmant indésirable du Dronabinol a commencé à s’atténuer et que des effets autrement positifs se sont produits. Depuis, ce médecin a rassemblé de nouveaux résultats auprès d’autres autistes. Il va néanmoins falloir attendre que des études cliniques complémentaires soient menées avant de pouvoir se prononcer définitivement en faveur des produits à base de cannabis pour le traitement de l’autisme.

Cannabis et la maladie d’Alzheimer

 Troubles du comportement liés à la maladie d’Alzheimer

Une étude sur l’utilisation de Dronabinol chez des patients souffrant de la maladie d’Alzheimer refusant de s’alimenter a été publiée en 1997 (Volicer, 1997). Au départ, les chercheurs qui ont conduit cette étude voulaient analyser uniquement l’action du Dronabinol sur l’appétit et sur le poids. Les patients avaient effectivement grossi pendant les trois semaines de traitement avec du Dronabinol, comparés aux patients qui avaient pris un placebo. L’intensité des troubles du comportement avait également diminué avec le Dronabinol. En revanche, pour tirer des conclusions plus larges, l’étude conduite avec seulement 15 sujets se révèle insuffisante, bien que les chercheurs restent persuadés que le Dronabinol représente « un nouveau moyen thérapeutique fortement prometteur » dans la lutte contre les troubles du comportement chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

En 2003, une étude similaire a été présentée devant le congrès de la Société américaine de gériatrie. Parmi 9 patients testés, tous atteints de la maladie d’Alzheimer, le traitement avec du Dronabinol a réduit considérablement l’agitation chez 6 patients et a augmenté les facultés intellectuelles chez 3 patients. Au début de l’essai, le Dronabinol a été administré à un dosage de deux fois 2,5 mg par jour. Ensuite, les doses ont été augmentées jusqu’à un maximum de deux fois 5 mg par jour. En parallèle, chaque patient a poursuivi son traitement initial.

Une étude conduite par des scientifiques de l’université de Londres a démontré que les cannabinoïdes pouvaient protéger les cellules nerveuses de l’effet toxique des beta-amyloïdes (Milton, 2002). Des dépôts anormaux, également appelés des dépôts de plaquettes, ont été observés dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les protéines impliquées dans ces dépôts sont les protéines beta-amyloïdes et les protéines tau. Il est probable qu’un taux élevé de ces beta-amyloïdes dans le cerveau pourrait conduire à la formation de ces plaquettes, probablement responsables des lésions cérébrales. « L’hypothèse sur laquelle je me base est que la protéine beta-amyloïde arrive dans le cerveau où elle est phosphorylée et où elle tue les cellules. Ces effets toxiques sont inhibés par les cannabinoïdes », a déclaré lors d’un com-muniqué de presse Nathaniel Milton, directeur de l’étude.

Cannabis et psychoses affectives, dépressions endogènes et troubles bipolaires

Cannabis et Psychoses affectives, dépressions endogènes et troubles bipolaires

Les troubles affectifs ou psychoses affectives, tout comme la schizophrénie, appartiennent à la famille des psychoses. Contrairement à d’autres maladies psychiatriques, ces troubles modifient profondément la personnalité des patients. Les psychoses affectives sont souvent associées à des phantasmes, des hallucinations, des sentiments d’angoisse ou de grandes peurs. Dans la plupart des cas, les personnes atteintes ne reconnaissent pas le fait d’être réellement malade, et tiennent des causes extérieures pour responsables.

Dans le groupe des psychoses affectives figurent également les dépressions endogènes ainsi que les troubles maniaco-dépressifs ou bipolaires.

Contrairement à la dépression réactionnelle, la dépression endogène n’est pas liée à une cause réellement perceptible. Elle se développe pour ainsi dire à l’intérieur et agit considé-rablement sur les sentiments, la façon de penser et le comportement du patient. Les symptômes de cette dépression englobent entre autres la perte de centres d’intérêt, de joie de vivre et de l’appétit ainsi que la tristesse, le sentiment de culpabilité, le manque de concentration, l’état d’abattement profond, la fatigue chronique et l’insomnie. Il n’est pas rare que des troubles physiques, comme des céphalées ou des troubles digestifs, s’ajoutent à cette liste. À ce sujet, certains patients ont témoigné d’effets bénéfiques du cannabis. Cependant, les bénéfices thérapeutiques potentiels des produits à base de cannabis dans le traitement des dépressions endogènes sont difficiles à évaluer à ce jour à cause du manque de résultats issus de la recherche médicale.

Dans le cas des troubles bipolaires, de nombreuses personnes ont également rapporté des bienfaits thérapeutiques grâce au cannabis. La psychose bipolaire, également appelée psychose maniaco-dépressive ou dépression maniaque, se caractérise par des phases de dépression endogène qui alternent avec des phases maniaques. Celles-ci sont accompagnées d’euphorie, d’idées extraordinaires, de sentiments d’invincibilité, d’hyper-activité, de manque de concentration et de pensées et paroles précipitées. Une publication scientifique de 1998 a présenté de nombreux cas, qui, grâce au cannabis, ont réussi à traiter soit leurs manies, soit leur état dépressif, voire les deux à la fois (Grinspoon, 1998). Certains patients ont utilisé du cannabis en combinaison avec du lithium, médicament commun dans les traitements des troubles bipolaires. Ils ont ainsi réussi à réduire le dosage de lithium ou à atténuer les effets secondaires de celui-ci.

Une vaste étude portant sur 3459 patients souffrant de bipolarité a été mené sur les effets du cannabis sur l’évolution des troubles. Après 12 mois de traitement, les consommateurs de cannabis ont présenté plus de complaisance et une sévérité accrue des troubles, manies et psychoses que les non consommateurs (Van Rossum, 2009).

J’ai reçu un courrier électronique de Californie où sont tolérés des buyers clubs, dispensaires distribuant du cannabis aux patients. En effet, malgré le refus du gouvernement fédéral américain, l’État californien autorise aux membres de ces associations de se procurer du cannabis. « Je m’appelle Derek D. Je m’occupe de l’association des patients de la côte nord, ici à XY, en Californie. J’ai assisté, en même temps qu’un de mes collègues, à l’évolution extraordinaire de l’état d’un de nos membres de San Francisco, atteint de troubles bipolaires. En effet, il y a une semaine, son état est passé d’une psychose bipolaire post-traumatique avec désorientation grave, à un état de lucidité totale et une cohérence neurologique complète, suite à deux inhalations d’huile de cannabis à 20 % de THC. Une telle métamorphose a été carrément miraculeuse », a écrit un membre d’une de ces associations.

Divers résultats d’études relatent des effets aggravants de la consommation de cannabis sur l’évolution de multiples psychoses schizophréniques, et ceci en dépit des nombreux témoignages de schizophrènes défendant l’usage du cannabis. Il semble qu’à long terme, le cannabis soit responsable de la plupart des rechutes. Par conséquent, l’application de produits dérivés de cannabis est généralement déconseillée pour le traitement de la schizophrénie.

Le cannabis peut néanmoins aider un nombre limité de patients. Des scientifiques du Centre Psychiatrique Rockland d’Orange-burg, New York, ont relaté l’amélioration des symptômes de schizophrénie chez 4 patients ayant reçu du Dronabinol oralement (Schwarcz, 2009). L’étude avait été demandée après une amélioration remarquable constatée chez l’un des patients. Les chercheurs ont également remarqué que 3 des 5 patients sévèrement atteints, résistants aux traitements habituels, avaient par le passé rapporté des effets positifs du cannabis et du THC. Ils sélectionnèrent les patients réfractaires à tout traitement et pour qui le risque était inférieur aux améliorations escomptées. Sur 200 patients atteints de psychoses chroniques, 5 ont été choisis. Un traitement au Dronabinol a été prescrit : 2,5 mg deux fois par jour, puis 5 mg deux fois par jour la deuxième semaine, et enfin 10 mg deux fois par jour la troisième semaine. Il a fallu huit semaines à l’un des patients pour ressentir une amélioration alors que les autres réagirent plus rapidement. Les chercheurs ont noté que « ces améliorations semblent se produire chez trois patients sur quatre au cœur du processus psychotique et pas seulement au niveau calmant ». Ces résultats suggèrent que « le rôle des cannabinoïdes dans les psychoses pourrait être plus complexe que supposé au départ. Ils ouvrent une nouvelle voie quant au rôle des cannabinoïdes dans le traitement de la schizophrénie ».

Angoisses et troubles de stress post-traumatiques

 Angoisses et troubles de stress post-traumatiques

Parfois, les effets psychotropes aigus des produits dérivés de cannabis peuvent provoquer des crises d’angoisse voire des accès de panique. En revanche, dans le cas d’angoisses chroniques ou de peurs paniques à répétition, sans cause extérieure apparente, le cannabis peut au contraire être tout à fait bénéfique.

D’après l’article d’un psychiatre des Services de Santé Canadiens aux Armées d’Ottawa, le cannabinoïde synthétique Nabilone a été efficace pour traiter les symptômes de troubles de stress post-traumatique. Le Nabilone a présenté des effets similaires au cannabinoïde naturel Dronabinol (THC) (Fraser 2009). L’étude a porté sur 47 patients diagnostiqués qui présentaient des cauchemars continuellement malgré les traitements conventionnels aux sédatifs et antidépresseurs. Ces patients reçurent un traitement de Nabilone et furent ensuite examinés dans une clinique psychiatrique spécialisée entre 2004 et 2006. La majorité des patients (72 %) traités au Nabilone ont vu leurs cauchemars cesser ou être réduits considérablement. Une augmentation du temps et de la qualité du sommeil, ainsi qu’une réduction des flashbacks et des sueurs nocturnes ont aussi été rapportés par certains patients. Cette étude clinique est la première à relater l’usage des cannabinoïdes dans le traite-ment des troubles de stress post-traumatiques.

Les vertus anxiolytiques des produits dérivés de cannabis s’expliquent par l’influence exercée sur la mémoire. En 2002, des scientifiques de l’Institut de psychiatrie Max-Planck de Munich (Allemagne) ont mené une étude qui a révélé le rôle primordial joué par le système cannabinoïde endogène dans l’effacement des souvenirs désagréables (Marsicano, 2002). Au cours des tests, les souris ayant reçu un inhibiteur des récepteurs aux cannabinoïdes, afin d’empêcher les endocannabinoïdes de s’y lier, ont révélé une diminution de leur capacité à effacer la peur de leur mémoire. Ces animaux, préalablement condi-tionnés à associer une note de musique à un électrochoc, ont manifesté des réactions de peur qui ont duré bien au-delà du temps où la note de musique n’était plus associée à un électrochoc. Les souris non préparées ont rapidement cessé leur réaction de peur face à la note de musique une fois qu’elle n’était plus associée au choc, contrairement aux souris ayant reçu le bloqueur de sites CB1. Une fois que les souris ont commencé à oublier leur réponse conditionnée aux chocs, les chercheurs ont découvert que des endocannabinoïdes avaient fortement imprégné une région du cerveau, l’amygdale, qui joue un rôle important dans la fonction de mémorisation des souvenirs d’événements à forte composante émotionnelle comme la peur.

Des chercheurs de l’université de Yale (États-Unis) se sont demandés pourquoi de nombreux schizophrènes étaient aussi des consommateurs de cannabis. Selon eux, la réponse se trouverait justement dans l’atténuation des angoisses et du stress (Krystal, 1999). Malgré un potentiel aggravant des symptômes de la schizophrénie lié à la prise de cannabis, ce dernier permet néanmoins aux personnes concernées d’oublier plus facilement leurs expériences négatives.

Dépression

Utiliser Cannabis pendant un dépression

Des études menées aux États-Unis sur l’utilisation du Drona-binol, chez des patients atteints du sida ou de cancers, ont révélé que de nombreux sujets ont ressenti non seulement une réduction de leurs souffrances physiques, mais également une amélioration de leur état dépressif provoqué par ces maladies graves (Beal, 1995 ; Regelson, 1976).

Lors d’une enquête commune (britannique et américaine) conduite en 1997 auprès de patients souffrant de sclérose en plaques, environ 90 % des personnes interrogées ont signalé que le cannabis leur était bénéfique pour soulager non seulement les divers troubles physiques, mais également leur état dépressif (Consroe, 1997). Une enquête similaire, menée auprès de personnes atteintes du sida, a été présentée en 2003 lors du Congrès de la Société Américaine de Psychologie. Là encore, les patients ont révélé que la consommation de cannabis calmait leurs troubles physiques, tels que la perte de l’appétit et les douleurs. En parallèle, 57 % d’entre eux ont répondu en disant qu’ils en fumaient pour des raisons psychologiques.

Grâce à son action psychoactive, le cannabis permet de soulager provisoirement des souffrances à la fois physiques et psychiques. Ainsi il fait entrer un peu de bonheur dans la vie des patients. Or, il est connu que la joie et la volonté de vivre ont un effet bénéfique sur l’évolution de nombreuses maladies, tandis que le découragement et le désespoir ont l’effet inverse. Grâce au dosage on peut contrôler l’effet psychotrope du cannabis. Au cours des enquêtes citées ci-dessus, de légers effets antidépresseurs ont été observés même à des dosages relativement faibles, sans effet perceptible sur l’état psychique des patients.

Un patient atteint de leucémie (leucémie myéloïde chronique, LMC) s’est fait prescrire du Dronabinol pour mieux faire face à la perte de l’appétit et aux nausées, deux des effets secondaires de la chimiothérapie. Comme de nombreux autres patients, il a également découvert les effets antidépresseurs du cannabis. « Depuis novembre 2001, je reçois un traitement à base de Dronabinol, à un dosage moyen de 500 mg par mois. Entre juillet 2001 et septembre 2002, la LMC a pu être stabilisée grâce à un traitement de 260 µg d’interféron par semaine. Depuis octobre 2002, en tant que substitut, je prends 400 mg d’imatinib par jour. Quand en novembre 2001, j’ai pris pour la première fois du Dronabinol, l’effet a été complètement libérateur. Tout à coup, je m’intéressais de nouveau à ce qui se passait dans le monde, je voulais et je pouvais à nouveau écouter de la musique et lire le journal. C’est sans aucun doute le Dronabinol qui m’a aidé à surmonter le gouffre fait de souffrances physiques et psychologiques et qui à rendu plus agréables mes journées jusqu’alors gâchées par les effets secondaires de l’interféron. Mais finalement, le Dronabinol n’a pas été suffisamment fort pour avoir l’efficacité de l’interféron, et à mon avis, même une augmentation des doses de THC n’y aurait rien changé. (… ) En revanche, depuis que j’ai fini le traitement à base d’interféron, je prends de nouveau du Dronabinol. Je préfère 20 mg de Dronabinol par jour à 150 mg de Zoloft® ».

Certaines expériences avec du Dronabinol faites par des médecins praticiens allemands démontrent que le THC n’est pas seulement bénéfique pour traiter les dépressions réactionnelles, souvent liées à des maladies graves, mais également les dépressions dites névrotiques c’est-à-dire celles où la personne a le sentiment d’être abattue, de manquer d’entrain et de joie de vivre sans raison particulière et cela pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois. C’est dans ce contexte que j’aimerais apporter un exemple extrême, le cas d’une jeune femme qui prenait régulièrement treize médicaments différents (voire davantage, si besoin), dont des neuroleptiques, des antidé-presseurs, des analgésiques et des tranquillisants. Aujourd’hui, une seule ordonnance, parfaitement adaptée à son cas, lui suffit. Elle comprend la prescription de trois fois 5 mg de Dronabinol et d’un antidépresseur. La Caisse Fédérale d’assurance maladie d’Autriche, a refusé le remboursement du Dronabinol. Ce sont ses parents qui paient le traitement.

Voici un autre témoignage qui m’est parvenu par courrier. Suite à un déménagement, un homme était obligé de changer de médecin. Ses nouveaux médecins étaient persuadés que la consommation de cannabis est à l’origine des problèmes psychologiques de leur patient. « Comme vous pouvez le constater en consultant le rapport médical ci-joint, je souffre depuis de nombreuses années de dépressions, de myalgies ainsi que d’autres troubles somatiques, qui, jusqu’à ce jour, n’ont toujours pas pu être soignés malgré les multiples thérapies que j’ai suivies. Un jour, chez une personne de mon entourage, l’occasion s’est présentée de goûter au cannabis. C’est alors que je me suis aperçu que je pouvais ainsi soulager considérablement mes souffrances. Mes angoisses, ma mélancolie d’origine dépressive, mes douleurs musculaires et les nausées, c’est-à-dire l’ensemble des symptômes liés à ma maladie psychologique, se sont ostensiblement atténués. C’est bien grâce au cannabis que j’ai pu retrouver la joie de vivre. Mais les problèmes ont ressurgi lorsque j’ai déménagé de XX à YY. Mes nouveaux médecins affirment que mes troubles psychologiques viennent de la consommation de cannabis. Or, ce n’est pas le cas ».

Maladies psychiatriques

Utilisation de cannabis avec maladies psychiatriques

«Une heure plus tard, une sensation d’émerveillement et de magnificence, à peine descriptible, m’envahit tout à coup. Les mots qui me viennent alors à l’esprit pour le décrire sont bien, extraordinaire et sublime. Cette sensation indescriptible est complètement subjective (…). L’idée d’être en parfaite harmonie avec la nature et avec tout l’univers prend forme. Ni le corps physique, ni l’individu n’existent. (….) Ce qui est présent, c’est un monde fait de merveilleuses images colorées où dominent le bleu, le pourpre et le vieil or, le tout accompagné d’effets d’ombres extrêmement délicats. (…) Peu à peu, le sommeil m’a envahi et j’ai très bien dormi jusqu’à l’heure à laquelle je me lève d’habitude. Au réveil, pas de sensation particulière à signaler. Je me sens, tout au plus, mieux reposé que les autres jours. Toutes les sensations décrites ont complètement disparu. Par contre, les souvenirs liés à ces expériences vécues sont très précis et bien présents à l’esprit ».

Robert Walton, professeur à l’université de médecine en Caroline du Sud (États-Unis) a publié en 1938 un traité s’intitulant Description de l’expérimentation du haschich, dont est extrait le récit ci-dessus, rapporté par un jeune médecin qui avait consommé intentionnellement une très forte dose de cannabis.

Suite à une prise de cannabis, au-delà des sensations de bonheur, qui par ailleurs sont très bénéfiques pour traiter les dépressions, des manifestations désagréables peuvent également apparaître, comme la peur, la panique et l’angoisse de la mort, notamment dans le cas d’un dosage trop élevé ou chez des consommateurs peu expérimentés. C’est la raison pour laquelle toute utilisation médicale des produits dérivés du cannabis doit être soigneusement accompagnée afin d’éviter les effets indésirables, notamment psychotropes. Toutefois, une légère euphorie apparaît souvent peu après une prise, même à faible dosage, sans modification perceptible de la conscience.